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Daglan, village situé dans un élargissement de la vallée du Céou, trait d'union entre le Haut Quercy et la rivière Dordogne, sort des brumes de l'histoire vers le Ve siècle, date à laquelle le lieu sert de lieu d'inhumation, comme le prouverai le vocable du patron titulaire de l'église paroissiale Saint Martin de Tours, mort à la fin du IVe siècle.

        Le nom du bourg, certainement d'origine celte, signifie en  français "Bonneval" ou "bonne vallée", combinant la racine celtique "Da" ou "Dag"signifiant rive ou vallée et "lan" ou "len" introduisant la notion de fertilité des terres. L'origine du nom serait donc gauloise, d'autant plus que des amoncellements de scories près du château de Pauliac prouve l'existence de forges datant de l'implantation de ces derniers sur le lieu. Quoi qu'il en soit, un "village primitif " devait exister à la fin du haut Moyen Age. En effet, A la création du diocèse de Sarlat en 1317, l'église paroissiale, les chapelles Sainte-Marie de las Novas et du Bedeaux existaient déjà. Cette dernière fut d'ailleurs de tous temps un lieu important de pèlerinage, attesté dès le XIIe siècle. Le lieu apparaît sous la dénomination "castro novo" avant le XIIIe siècle.

    C'est au début du XIVe siècle que l'église de Daglan est citée sous le terme "Sanctus Martinsis de Dagliono". L'appellation actuelle latinisée se trouve dès 1489 sous la forme "Dagliono". En partie détruite par la guerre de cent ans, elle fut reconstruite et agrandie suite à celle des guerres de religion par une succession de petites chapelles. Seul le chœur et l'abside sont de l'époque romane, comme le prouve les deux culs de lampe de cette dernière. Au XIXe siècle, de 1898 à 1900, menaçant ruine, elle fut restaurée abusivement car agrandie encore une fois suite aux réclamations des habitants. L'église, semble-t-il, fut toujours dédiée à saint Martin. A proximité de cette dernière, la fontaine Sainte-Marie fut, peut-être, un lieu de dévotions, comme le prouverait sa forme de croix latine. 

       De 1281 jusqu'à la fin du XIVe siècle, les deux petites seigneuries dépendirent de Domme Vieille, faisant partie des biens de Gilbert de Domme. Celle de Pauliac tomba aux mains  des Cugnac-Caussade, puis vers 1680 ce furent les Goudin, seigneurs de la Roussie (Proissans), qui en héritèrent. Le château du  Peyruzel, dont les parties les plus anciennes sont datées du XIIIe siècle, appartient ensuite aux Solminihac, puis, par alliance, aux La Roque de Saint-pompon et aux Cugnac de Giverzac. La famille de Mirandol s'installa dans les murs suite à l'achat de la seigneurie par François de Mirandol en 1595. Les Mirandol, qui possédaient aussi la château de Péchaut, y vécurent alternativement. Ils conserveront les deux jusqu'à la révolution française. 

       La paroisse, assez peuplée, compte en 1365, entre 500 ou 600 habitants. Pour preuve, Raymond de Roquecorn, premier évêque de Sarlat, en fit l'une des sept archiprêtrés de son diocèse, qui réunissait dix-huit paroisses. Notre paroisse eut à souffrir des ravages dus à la guerre de cent ans et à la peste noire qui dépeuplèrent presque en totalité Daglan et ses environs. Gilbert de Domme, sénéchal du roi de France, trahit souvent ce dernier, profitant des troubles occasionnés pour agrandir sa fortune et son fief. Ainsi, en 1358, il projettera même de s'emparer de Sarlat  et d'en rapporter le butin à Daglan. Fin XIVe, le château du Peyruzel sera même occupé par des routiers anglais, qui écumeront le pays et ses alentours. Une fois la paix revenue, Daglan se repeupla rapidement avec l'aide de population en provenance du Limousin, du Bas-Quercy et du massif central.. atteignant dès le fin du XVIIe siècle près de 1500 personnes. En 1701, notre paroisse compte deux cent quatre-vingt dix-huit feux, soit environ mille quatre cent soixante habitants. Les terres y sont décrites comme "bonnes". Le maximum de population sera atteint au milieu du XIXe siècle où le chiffre des recensements indique plus de mille six cent Daglanais. En 1876, on en recense mille six cent quinze, puis ce chiffre  se stabilisera jusqu'au début du XXe siècle autour de mille cinq cent quarante personnes. Ensuite, la population sera touchée par l'exode rural du à l'échec, en partie, de la replantation de la vigne suite à la crise liée au phylloxéra (vers 1880 ici), l'impossibilité de mécaniser la travail agricole, la guerre de 14-18. Alors qu'en 1901 il y avait encore mille cinq cent vingt-six Daglanais, cinq ans plus tard, ils ne sont déjà plus que mille trois cent vingt-quatre. Mais la véritable chute date des années 1920. En 1990, Daglan comptait 477 habitants, aujourd'hui, en 2004, 535.

        Deux facteurs sont à l'origine du  renouveau de Daglan après la guerre de cent ans : ses nombreux moulins au nombre de dix et le fameux vignoble du pays de Domme.

        En effet, les sols calcaires du causse, pauvres, convenaient parfaitement à la vigne. Ils se virent donc bientôt recouverts de cette dernière, ce mouvement de plantation avantageux débutant dès le fin de la guerre de cent ans. Le vin de Domme, très prisé par les hollandais et les anglais, ainsi que par la cour du roi de France, connu alors une grande renommée. Le bourg, avec l'accession d'une bourgeoisie locale, souvent originaire de Domme, se couvre d'hôtels particuliers, tel celui de Mirandol, de Montmirail, rue de la fontaine (anciennement appelé Lavergne), de Revaugier (ancien hôtel Bouquet), à proximité d'hôtels nobles (la mairie).

        Mais cette période de prospérité devait s'arrêter avec les guerres de religion où Daglan, placé le long du futur "grand chemin royal" de Limoges à Agen devait subir les passages des troupes et des dégradations, vols, pillages en tout genre. Pauliac devait servir "d"hôpital" à Geoffroy de Vivans, seigneur de Doissat, capitaine du château de Castelnaud, c'est-à-dire de base arrière. L'Édit de Nantes mettra fin à cette guerre fratricide. Si notre paroisse ne souffrit pas trop de la révolte paysanne de 1594-95, cela ne fut pas le cas pour celle de 1707, celle des "Tards avisés". Le 15 mars de cette année, à la nuit tombante, près de deux cent hommes armés de fourches, bâtons, fusils envahirent le bourg et menaçant ses habitants exigèrent qu'un certain nombre les suive dans leur entreprise. On sait comment cela se termina. Ayant échouer devant Sarlat, ces derniers refluèrent en masse de l'autre côté de la rivière, c'est-à-dire encore une fois par la vallée du Céou, puis retournèrent à leurs champs.

        La charge d'archiprêtre était enviable, en raison des revenus qu'elle procurait. Un des derniers possesseurs de cette dernière au XVIIe siècle, Jean Vabre, sieur de Chateauneuf, docteur en théologie, conseiller et aumônier du roi s'intéressa particulièrement au vin et à ses revenus, au point d'enquêter en 1675 jusque dans les caves de ses ouailles ! Ce ne fut pas le seul à présenter à l'histoire un visage particulier. Son successeur, François Bial, aurait été l'objet d'une tentative d'assassinat de la part de J.-B. Bousquet qui en 1717 devra lui demander pardon à la messe pour l'avoir "témérairement insulté"!  Neuf ans plus tard, Jean Vabre le provoquera même en duel après lui avoir jeté un verre de vin au visage. Mais cela n'est que peccadilles par rapport à ce qui suit. Il fut accusé par Jean Martial devant la justice d'être l'amant de sa femme. 

    La révolution fera disparaître l'archiprêtré. Mais pendant six ans, Daglan fut alors chef lieu de canton, pourvu d'une justice de paix, devenant une simple commune du canton de Domme en 1800. Bien qu'ayant abolie les droits féodaux, ayant balayé les structures et les principaux symboles de l'Ancien Régime, la révolution fut aussi synonyme de troubles fréquents en période de fort bouleversement. Le principal problème vint de la politique anti-religieuse pratiquée par la convention et les régimes successifs jusqu'au consulat. Daglan devait connaître des évènements tragiques. Un de ses représentants, député de la constituante, l'abbé Delfaut, le dernier archiprêtre de Daglan, qui avait pourtant voté la fin du droit féodal et bon nombre de mesures dans l'esprit du temps,  refusa de prêter serment à la constitution civil du clergé. Ainsi devenu "réfractaire"selon le terme de l'époque, il fut arrêté le 10 août 1792 et emprisonné avec d'autres dans le couvent des Carmes, à Paris. Le 2 septembre de la même année, après un discours enflammé de Danton devant la situation des troupes de la république, les sections jacobines exaltées forcèrent la faible garde placée devant ledit lieu et prouvèrent aux ennemies du peuple leur détermination en massacrant près de cent cinquante religieux, dont l'abbé Delfaut.

        Lassé par l'instabilité politique, la situation économique catastrophique et la menace aux frontières du pays qui avait provoqué le décret de levée en masse du 16 et 23 août 1793 qui concernait tous les hommes valides de dix-huit à quarante ans, sans possibilité de remplacement, une bonne partie de la population, fortement religieuse, se heurta encore au pouvoir. Ainsi, en 1794, quand la seconde vague de terreur s'abattant sur le pays, le district de Sarlat, jusqu'alors peu zélé, voulut dénombrer les biens d'églises (notamment les cloches et objets servant au culte), ces représentants furent reçus par des jets de pierre et une bastonnade auxquels ils n'échappèrent qu'en prenant la fuite devant une "nuée de femmes". En l'an XI, les mois de ventôse et germinal, une cabale, toujours orchestrée par les femmes, réussit par deux fois à empêcher la prise de fonction à la cure de Maraval, nommé à ce poste en remplacement de Camot. On lança pour cette raison neuf mandats d'amener contre les principales meneuses.

        On a déjà évoqué la situation économique. Cette dernière provoqua aussi, comme au temps de l'Ancien Régime, un soulèvement populaire contre les employés de la régie de Domme. Commencé le 18 novembre 1814, elle devait reprendre trois jours plus tard avec le soutient actif des habitants de Daglan, Castelnaud, La Chapelle-Péchaut, Cénac qui prirent en otage le maire et certains riches propriétaires, les emmenant jusqu'à Sarlat où ils libérèrent le meneur, Soulier. Devant son importance (on comptabilisa deux mille personnes !) on ne poursuivit guère les participants.

        Mais la période de la crise du phylloxéra mit fin à cette prospérité dès 1880. La replantation de nouveaux plans appuyée par l'invention de la bouillie bordelaise, les tentatives de  mise en culture de pins, de lavandes sur les causses ne pesa que fort peu face à la mécanisation et à une dépopulation déjà commencée. La guerre de 14-18 portera un coup fatal. Cette "saigné humaine" réduira à peu la population de Daglan.

        Aujourd'hui gros bourg de 535 habitants, pourvu de la maison de la pierre sèche couplée avec l'exposition des vieux outils et objets d'autrefois, d'un jeune syndicat d'initiative, Daglan vous invite à la découverte de son histoire.

antan